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Un testament est dans la commode, j'en suis certain.
Telle est la phrase mystère du jour. Pardonnez-moi d'user d'un procédé à la Gaston Leroux...
Venons-en au fait.
J'ai évoqué ici en son temps, et à deux reprises ( une, deux ) un projet éditorial : La succession pour les nuls. Eh bien nous en sommes à une, deux, trois...En effet,des circonstances indépendantes de ma volonté, mais que je m'autorise à exploiter, me poussent à proposer à mon éditeur virtuel non pas un tome deux (à l'instar de l'ancienne aventure testamentaire et de la nouvelle aventure testamentaire), mais une non-édition revue et augmentée de la non-édition précédente.
En effet, le fil directeur de le première non-édition avait la couleur verte de l'espérance : comment faire pour réussir une sucession, fut-elle complexe tant par le nombre et la disparité mentale et affective des hoirs que par la complication intrinsèque des dispositions du de cujus.
Erreur due à ma naïveté.
Il convient, à la lumière d'un vécu récent, de mêler à ce fil vert le fil noir des desseins contrariants, des projets contraires, des égoïsmes antagonistes. De manière concrète, il est à mon avis nécessaire, soit par ajout d'une section spécifique à chaque chapitre, soit par ajout d'un (gros) chapitre établi à cette fin, d'identifier et énumérer toutes les manoeuvres capables de ralentir et/ou bloquer le processus, de transformer le deuil, fracture entre un mort et des vivants, en brouille, fracture entre les vivants survivants.
Voilà donc quelque conseils à l'héritier amateur de chicore [1] . Il n'y a en effet aucune raison, dans la mesure où ce livre a pour projet d'aider les nuls, ce qui peut vouloir dire les extirper de la nullité tout autant que les rendre plus nuls que nuls (au secours, Raymond Devos, toi qui démontra avec astuce que rien c'est déjà quelque chose ! ), qu'ils soient éliminés de ce dessein altruiste.
Il y a un droit à la méchanceté, il y a un droit à la bêtise. Un jour, il deviendront peut-être même constitutionnels. Simultanément, il faut l'espérer car la méchanceté s'allie souvent à la bêtise...et cela donne rarement la même réussite qu'Hara-Kiri...
Ces conseils, je les formule ici un peu dans le désordre. Mon Hetzel personnel m'aidera certainement à secouer tout ça dans un chapeau et à tirer les idées dans l'ordre juste.
♦ Mettez autant de notaires que possible dans le circuit : les lenteurs et les précautions sont multiplicatives, pas additives.
♦ Donnez à votre entourage immédiat des informations soigneusement choisies pour être à la fois incomplètes et contradictoires : moins ils comprendront, plus vous serez tranquille.
♦ N'hésitez pas à nier les faits les mieux établis par vos partenaires : s'ils ont des preuves, cela prouve bien qu'ils préparaient un sale coup...
♦ Pratiquez le procès d'intention systématique : cela créera tôt ou tard un incident en votre faveur.
♦ Attribuez à vos partenaires vos propres dérives, excès ou lacunes : ce sera à coup sûr leur donner, ainsi qu'aux tiers par ricochet, une très mauvaise image d'eux-mêmes. Et s'ils sont à peu près honnêtes, vos affirmations auront le mérite, à défaut d'être vraies, d'être vraisemblables.
♦ Evaluez tout en termes strictement financiers : un héritage est une affaire, pas un partage.
♦ Mobilisez aussi, même si vous ne les pratiquez pas vous-même, et surtout si vous ne les pratiquez que superficiellement, des valeurs religieuses : les agnostiques et les libertaires ont toujours un peu mauvaise presse, cela vous aidera donc.
♦ Reprochez à vos partenaires d'attenter à l'honneur du défunt, à mots couverts d'abord : plus ils s'en défendront, plus votre reproche aidera à les disqualifier.
♦ Ne relisez les actes notariés que pour pouvoir dire soupçonner des anomalies de forme : comme vous ne comprenez rien au fond, cela vous donnera toutes les apparences du sérieux impartial. Et cela mettra vos partenaires dans l'obligation de justifier des énoncés exacts. Par ailleurs, comme nul n'est à l'abri d'un coup de chance, il y aura bien une ferreur de rappe, pardon, une erreur de frappe quelque part.
♦ Si vous soupçonnez de telles anomalies, surtout n'explicitez pas la formulation qui vous aurait convenu : vela vous évitera le désagrément de devoir reconnaître que vous agissiez soit par ignorance, soit par provocation.
♦ Si possible, découvrez tardivement dans le fond d'un tiroir un document ayant quelque apparence testamentaire : même s'il est déjà connu de tous, cela n'a pas d'importance, votre but n'est pas d'établir ou rétablir les droits de telle ou tel, mais bien de semer le doute.
Crédits :
Merci à Jules François Félix Husson, dit Fleury, dit Champfleury, auteur réaliste, ami de Gustave Courbet, expert en faïences, conservateur du musée de Sèvres, pour son roman La succession Le Camus, Paris, A.Cadot, 1858, puis Michel Lévy Frères, 1864, et surtout à François Bonvin pour son frontispice.
Un des intérêts, relativement à ce papier, du roman cité ci-dessus est que c'est page 347 (édition de 1858) que figure la phrase-mystère placée en incipit.
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[1] Rien à voir avec la chicorée Leroux ou l'ami Ricorée...Il s'agit bien de castagne, de baston et autres bagarres...
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